• ça sent le soufre

    Je ne sais plus si j'en avais parlé mais il y a une expédition en cours sur la banquise au nord de Svalbard et elle touche à sa fin... et personnellement, je trouve que ça sent le soufre

    Pour faire court, 2 explorateurs chevronnés, Mike Horn et un norvégien Børge Ousland, se sont fait largués à 85°N côté russe, mi septembre ou un truc dans ce goût-là, on rejoint laborieusement le pôle Nord puis ont mis le cap sur le bord de la banquise au nord du Svalbard.

    C'est tout particulièrement cette phase-là qui me déplaît fortement depuis que j'ai entendu parler du projet. Ces 2 explorateurs ont fait l'expérience de skier de nuit sur la banquise mais ils n'étaient pas très loin du pôle où il y a très peu d'ours, voire pas du tout. Quand ils vont se rapprocher de la bordure de la banquise de notre côté, ça va être une autre histoire... nuit noire, beaucoup plus d'ours et la fatigue accumulée depuis 2 bons mois... une très mauvaise combinaison

    Un autre point qui m'a toujours fait tiquer aussi, c'est le plan de récupération par un super voilier, le Pangea, qui est à quai à Longyearbyen depuis un bail, depuis qu'il les a largués de l'autre côté du pôle puis a contourné la situation jusqu'à nous. J'avais discuté avec un membre de l'équipage et il n'avait pas été sans mal de trouver un accès à un endroit convenable pour les larguer sur la banquise: une banquise suffisamment cassée pour que le voilier puisse passer, naviguer entre les morceaux mais une banquise suffisamment compacte pour que les 2 explorateurs puissent skier dessus avec tout leur bardas. Je ne voyais pas très bien en quoi ça allait être plus simple de l'autre côté alors qu'il fait nuit et qu'il faut arriver à se retrouver dans un monde en mouvement perpétuel

    L'expédition touche maintenant à sa fin, tout simplement parce qu'ils arrivent au bout de leurs réserves de nourriture et la dernière ration correspond au 5 décembre. La situation côté glace n'est pas simple (mais ce n'est pas surprenant) : il n'y a pas une bordure nette.

    ça sent le soufre

    Je ne sais pas quelle est leur position actuelle exacte (hier ils parlaient de 84°N) mais il ne semble pas possible qu'ils puissent rejoindre le bateau par eux-mêmes. Un plan B a été mis en place :

    - d'une part ils ont fait appel au Lance, le bateau qu'Unis (l'université) a longtemps utilisé pour ces campagnes de recherche avant d'avoir le Prins Haakon. C'est un brise-glace qui a déjà hiverné dans la banquise. ça paraît plus raisonnable que de naviguer avec un voilier coque alu... un coup à ce que le voilier reste pris dans les glaces ou prenne l'eau...

    ça sent le soufre

    photo Bjoertvedt, site Norsk Polar Institutt

    Lance est en ce moment-même en chemin, mais ça prend son temps. Il a quitté Tromsø hier soir et je dirais qu'il lui faut encore 2 jours pour atteindre Longyearbyen. Là, il va récupérer une équipes d'explorateurs (d'autres... ça grouille ces petites bêtes) et il va lui falloir encore un bon jour et demi, peut-être 2 jours pour atteindre le bord de la banquise au nord de Sjuøyane. Là, les explorateurs vont être largués et aller à la rencontre des 2 autres de sorte à les ravitailler (en vivre et carburant pour le groupe électrogène) mais j'ai un peu du mal à comprendre comment ça peut marcher cette histoire.

    La banquise dérive et pas de façon homogène, c'est pas franchement facile de suivre une direction sachant qu'en plus, il faut contourner les zones où il n'y a pas de glace (polynias) ou où la glace est trop fine.

    Difficile de savoir jusqu'où Lance va pouvoir aller, sans doute pas beaucoup plus nord que 81°N... ça laisse 300 km au bas mot, même avec 2 équipes allant l'une vers l'autre, j'ai du mal à croire qu'ils arrivent à se rejoindre avant le 5 décembre. Si le vent/ la dérive de la banquise aide une équipe, l'effet sera inverse sur l'autre équipe, donc pas trop d'espoir à avoir de ce côté-là.

    Ceux qui utilisent Instagram peuvent suivre les 2 explorateurs @mikehornexplorer https://www.instagram.com/mikehornexplorer/ et @borgeousland https://www.instagram.com/borgeousland/

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Patrick Audoux
    Jeudi 28 Novembre 2019 à 12:44

    Oui, pas terrible la tournure que prend cette expé ! Il serait temps qu'ils rejoignent la "civilisation". Mais la progression est difficile compte tenu de la qualité de la glace, de la météo, des gelures, du manque de vivre et de leur niveau d'épuisement à 500 km du but, dans ces conditions. Tout cela est très inquiétant et je me faisais la même réflexion quant aux possibilités d'approche des secours à cette période de l'année et aux risques grandissants de croiser des ours à l'approche du "bord", sûrement très instable et fluctuant, de la banquise. Ce brise-glace (toujours mieux que le coque alu prévu initialement) est-il suffisamment puissant pour s'enfoncer assez profond dans la glace, sans propulsion nucléaire, pour qu'ils ne prennent pas trop de risques en approchant du "bord" ? Rien n'est moins sûr... Et il ne semble pas équipé de plateforme à hélico qui pourrait permettre de les hélitreuiller ou au moins de leur larguer des vivres et des vêtements secs (s'ils sont en capacité de terminer leur expé) quand ils seront beaucoup plus proche... soit un bon 300 km de leur position actuelle... Tout "secours" doit donc se faire à pieds... Je partage vraiment tes inquiétudes. 

    2
    Sophie L
    Jeudi 28 Novembre 2019 à 13:12

    On en parle ces jours-ci surtout parce que Mike Horn est passé à travers la glace et il semble en plus blessé/gelé, ce qui n'aide pas. Mais je n'avais pas envisagé ces difficultés logistiques de récupération (même si le fait qu'ils se dirigent vers le Svalbard à cette saison m'avait posé question). Merci pour ces détails et je suis curieuse pour la suite (mais en effet ça ne se présente pas super bien).

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