Non ! la dépression polaire, ce n'est pas la description de mon état psychologique  mais c'est un phénomène météo récurrent dans le nord de la Norvège (entre autres) et chez moi... en l'occurence

Et hier soir, je l'ai bien testé. J'étais chez une amie et il s'était mis à neiger à gros flocons mais pour ainsi dire sans vent (bien que les prévisions météo du matin aient annoncé l'apocalypse). J'attendais que ça se calme, et ça a fini par s'arrêter. Le temps de finir mon thé et me motiver, j'entreprends de m'habiller et me préparer à sortir, et là... paf ! l'apocalypse a démarré. Courageuse (inconscience plutôt), je me dis que ça ne doit pas être si horrible que ça, qu'il ne fait pas froid (0/1°C sans l'effet du vent) et que la direction du vent m'est plutôt favorable. Me voici partie, et j'avais à peine passé le coin du bâtiment que j'ai bien compris que j'avais fait une grosse connerie.

Visibilité absolument nulle... heureusement, il y a des piquets sur le bord des routes. Mon plus gros problème a été de traverser la route principale parce que je n'arrivais pas à voir s'il y avait des voitures ou pas. Je ne pouvais pas tourner la tête face au vent non plus, sinon je me prenais en pleine poire un jet de flocons de neige gelés, impossible d'ouvrir les yeux tellement ça faisait mal. J'attendais une accalmie (2 secondes m'auraient suffi mais non...) au final, une voiture est arrivée du mauvais côté et s'est arrêtée, je savais donc que de ce côté-là c'était safe et j'ai enfin pu traverser. 

2e aventure: la traversée de la rivière avec le vent de côté. Sur le pont, pas de problème, j'étais bloquée par les protections mais arrivée de l'autre côté, j'ai fait un remix de Autant en emporte le vent. J'ai été propulsée dans le talus, malgré les crampons. La couche de glace au sol n'aidait pas... La déneigeuse est passée à ce moment-là et le chauffeur m'a dit de monter mais je n'ai même pas réussi à faire le tour de l'engin, même en m'y accrochant. Arrivée de l'autre côté, la situation s'est améliorée. Je pouvais marcher le long de la piste de ski (un bien grand mot) et je ne risquais pas de me faire écraser au moins.

je n'ai jamais vu le vent changer aussi vite avec une telle ampleur

à l'aéroport il a été mesuré 36 m/s (ou 130 km/h si vous préférez) au  moment où j'étais dehors... ouragan commence à 32 !

C'est comme si quelqu'un avait appuyé sur l'interrupteur. 

Dans la vallée (Adventdalen), c'était un tantinet mieux(ou moins horrible)

Et on doit bien admettre que les prévisions météo avaient vu juste

yr.no hier matin

mais eux-même n'avaient pas l'air d'y croire et 2 heures plus tard, les prévisions étaient moins dramatiques

C'était en fait pil poil pour la phase apocalyptique, par contre dans la journée, pas de vent, donc on n'y croyait plus. Les dépressions polaires sont très difficiles à prévoir justement à cause de la rapidité des changements et du fait que le coeur de la dépression passe sur une zone très limitée et qu'il est difficile de modéliser où exactement sera cette zone. 

J'ai aussi appris un nouveau symbole: le petit tourbillon jaune, qui est le symbole de dépression polaire (polart lavtrykk en norvégien) et en gros, ça veut dire "reste chez toi"

et le descriptif est étonnamment juste: changements rapides de la vitesse et direction du vent, éviter les déplacements inutiles, visibilité réduite

Emotions fortes donc... mais on apprend de ses erreurs... même après presque 9 ans au Svalbard 

J'espère que personne ne campait hier soir 

Juste pour le fun, une copie d'écran de ce qu'a vu la webcam du port...

avant

pendant